Juin

Vendredi 5 juin
Dans l’attente d’avoir accès à la salle de Cinécité qui diffuse l’unique séance de Home d’Arthus-Bertrand, produit par l’hyper consommateur d’énergie Luc Besson.
Le chaos planétaire qui va nous être exposé, avec une perspective constructive, a trouvé son écho politique sur le plateau d’Arlette Chabot. La directrice de l’information de France 2 s’attendait sans doute à du musclé, mais point à la débâcle bruyante des échanges. Maître révélé dans l’indigente petite crasse, Bayrou en quête d’une troisième place qui lui échappe au profit de son nouvel ennemi : Cohn-Bendit. Première insinuation de copinage avec Sarkozy, le député européen s’emporte pour lui prédire un « minable » destin à l’aune de sa pantagruélique ambition.


Lundi 8 juin, 22h58
Edifiants résultats des élections européennes. Les 60% d’abstentionnistes d’abord : du je m’en foutisme, du désintérêt ou de la défiance. Pourtant l’Union européenne a offert, jusqu’à aujourd’hui, une paix et une stabilité sans pareille à des générations entières. Le gros des sans-vote n’a certainement aucune affinité avec les thèses anarchistes d’un Coupat.
Pour le reste, la déculottée prise par un Bayrou en berne, ayant perdu toute affection (cf. son programme des Présidentielles 2007) et qui n’a plus comme voie obligée, mais peut-être suicidaire, que l’acharnement à se projeter dans la bataille pour la première des places politiques, en 2012. Quitte ou double, comme le proposait un jeu radiophonique : celui de Bayrou ne tolérera aucun échec.
La haine déchaînée sur la toile contre un président, certes critiquable, n’a rien rapporté à ce vivace opposant.


Mercredi 10 juin, 23h30
On pourrait croire que les médias traditionnels, l’hydre à trois têtes, est à la solde de Sarkozy tant les critiques et les analyses au vitriol se multiplient après la réunion des têtes dirigeantes et influentes du PS, pour répondre à la déroute électorale. Pourtant, c’est bien le fond sidérant de ce comité national qui nourrit seul les charges sévères. Pour résumer : une nouvelle promesse d'intention de "refondation" dans... six mois ! Quelle réactivité ! Quel sens politique ! C'en est presque touchant de les constater si désemparés ces engagés politiques à l'ancienne mode.
Pas pour demain un leader qui transcendera les différends de tous les éléphants et de la nouvelle génération, pas plus axée sur les propositions.
Ce qui monopolise leur discours, ce sont les possibilités de résoudre leurs dysfonctionnements. Rien sur une autre gestion de la crise...


Vendredi 12 juin
Ne pas se laisser distraire pour accrocher les signes du temps, comme les révélateurs d’une débâcle aux accents contradictoires.
Les énervés de la crise, qui se crispent dès qu’un revenu d’employeur explose le sens commun, ne remuent pas le poil d’une oreille à la révélation de la prochaine rémunération d’un footballeur au sommet. Le tapeur de baballe se positionne sans mal au plus haut de la très longue échelle des salaires : face au taux horaire du Smic, durement gagné par une part de ses adorateurs, il inaugure le Smic/horaire… le gain d’un Smic par heure. Rien de choquant en soi selon le principe économique qu’une rareté se paye bien plus qu’un produit courant.
Ce qui navre, c’est l’apathie des errants du Pôle face à la goinfrerie du joueur et leur hargne vindicative dès qu’il s’agit d’un dirigeant moins sexy dans ses entournures, juste chargé de faire réussir une entité économique qui assure l’existence d’une foule d’âmes
Les tragiques et les comiques se retrouvent pour catapulter nos plates trajectoires vers d’hérissés horizons. Comme une guerre sourde, fantasmée, qui n’attend que le prétexte pour révéler ses actants déchaînés.
Rappelle-toi tes parents dans la casbah, tes grands-parents, comme les arrières, à l’arme lourde ou à la baïonnette incisive… tu veux quoi de plus ? Une fragile époque de paix qui ne survit que par un minimum social de prospérité.


Samedi 13 juin
Miribel au peuple bon enfant : ça fourmille et s’illusionne sur la joie de vivre comme au temps des années folles. A prendre comme une parenthèse d’insouciance.
Quelque deux mille personnes perdent leur emploi en France chaque jour : paupérisation progressive du pays qui ne pourra compenser indéfiniment les manques financiers d’un peuple dont les acquis sociaux ne tiennent que par les perfusions étatiques d’emprunts sur la scène financière du monde. Avec un déficit d’environ cent milliards d’euros, l’Etat dépense un euro sur trois qu’elle n’a pas.


Dimanche 14 juin
Farces à trappes

Raison d’être : filer vers le néant en ayant cru à sa place. Croiser l’autre pour s’oublier un peu, se sublimer parfois.
L’intellect trop collé aux excroissances des champs médiatiques, les sens atrophiés par la simplification d’une existence sereine : on fuit la contrainte, l’adversité réelle pour soi, le pénible dérangement ! Cultive ton cocon, tant que tu peux : autrui doit demeurer l’accessoire pour qu’il ne s’ancre pas tel un envahisseur de conscience.
Ça gargouille. Intérieurs trop sollicités par une bombance au Carré Saône : six cents grammes de barbaque exquise ingurgités ; une vésicule qui déraille… Extérieur en suspens : un vague ci-gît le système, les modèles conditionnant, la civilisation même ! Bienvenu dans le monde des garces farces à trappes. L’incertain viendra d’où on ne l’attend plus.
Balade intérieure, désintégration aérienne : j’ai choisi mon camp, sans fortune. A terre, j’enracine mes petits plaisirs quotidiens sans parade relationnelle, sans dégoulinade matérielle. Témoin de loin, et au rythme parcellaire, des scories planétaires, je cultive le son scriptural : ça gratouille !
Se dégager un peu – « et peut-être plus ! » polnareffirais-je – de la rassurante poussée argumentative sans pour autant se vautrer dans l’imaginaire prétendument étranger à soi. Gare aux frontières ! Sus aux alvéoles ! Haro sur les contingences ! Pas de faux-semblants, marre du vraisemblable seriné : il nous faut coltraniser d’urgence nos fugaces pesanteurs.
Déploie ta langue pour goûter au plus près les interstices fruités. Comprendre ? Ressentir, d’abord, pour s’alléger des cons à pendre. La peine des morts c’est de n’avoir plus droit, pour exister un chouia, qu’aux pensées des autres, les agités du globe qui survivent en bocal.
Dans l’attente de ne pas vous rejoindre, monceaux de poussières pour un infini en mouvements perpétuels. Là, tout près du tronc qui craque… Hue !


Jeudi 18 juin, 22h39
L’année prochaine, les soixante-dix ans de l’Appel du plus illustre des Français du XXe siècle, l’un des dix personnages clefs de l’histoire hexagonale. Etre le premier à y penser, un an avant, voilà qui permet de sortir un peu plus du temps présent.


Vendredi 26 juin, 0h51
Michael Jackson décédé : arrêt cardiaque à cinquante ans ! Tragique destin si fantastiquement commencé : les répétitions pour son retour sur scène, le 13 juillet prochain à Londres, auront eu raison du fragile roi de la pop. C’est par France Info, à minuit passé, que la nouvelle m’est parvenue. Google actualité recensait, à 0h30, près de cent quarante articles en français sur le sujet. La valse des titres, les minutes s’écoulant, pointait l’alarmiste hospitalisation, puis l’annonce du décès avec conditionnel d’usage pour, enfin, se risquer au mode de la certitude.
Internet accélère d’une fantastique façon le trajet et l’affinement de l’information, tant que la manipulation ne s’invite pas sur la toile, ce qu’on ne peut éviter totalement.

Florence & Michael, outre mode !

Ampleur prévisible de l'écho planétaire pour feu Jackson.
Revenir à l'essentiel : trois bon vieux CD du "popiste" sacré, à défaut de vinyles, pour réécouter, en choix aléatoires, son chanté millimétré. Vitalité régénérante des mélodies atomiques, comme une invitation à l'accélération en tempos indémodables. Voix faite musique, airs ciselés rythmique : symbiose...
Si Jackson rejoint le firmament, Rey retrouve elle la liberté. Me revient ce que j'écrivais en 1994, lors de son arrestation :
"Brève épopée meurtrière d'un couple révulsé des fibres, l'âme injectée de haine. Les french Bonnie and Clyde transcendent leur minable casse en fulgurante perdition. Course poursuite dans Paris, feu sur les poulets, trois blessés à la balle pour sangliers, un chauffeur de taxi tué, et les politiques qui s'émeuvent. Le rodéo a ses victimes dans les rangs de la force publique comme dans le duo des anarcho-tueurs. L'homme a flanché à l'hôpital.
Reste le petit bout de jeune fille, émouvante par ses traits, confusément attachante, orpheline, sa vie foutue... Je n'aurais pas eu, moi aussi, ma vie majoritaire devant moi, j'aurais volontiers proposé ma vieille carcasse pour la remplacer dans la geôle. Elle aurait dû crever avec son compagnon, en apothéose destructrice. La grosse machine judiciaire, puis pénitentiaire aura raison de sa pureté. Florence, elle se prénomme.
Chère Florence, tu es une criminelle, certes, tu as éliminé d'innocentes personnes et désespéré des familles, mais je décèle une humanité éperdue dans tes yeux. Pauvre de toi, décalée dans cet univers."
Rapprochement incongru de l'ex tueuse née d'un jour et de la star refroidie pour toujours ? Sans aucun doute une pulsion littéraire irrationnelle. M'en contrefiche. Au diable les codes limitatifs ! Rey-Jackson sonne comme un tragique appel harmonique, celui d'un XXe à l'agonie qui n'en finit pas de hoqueter ses icônes et ses actants.


Dimanche 28 juin
Ma BB déjà en vacances, pour moi une semaine d’administratif dominant et puis le grand tournis des rendez-vous sur les terres de France : séjour expresse à Paris pour revoir notamment Shue et Karl ; avec ma BB suivront Le Cellier, vers Carcassonne, Fontès puis Arles avant un retour au bercail.


Dans mon cocon vert préféré, à la lisière de la roseraie du parc Tête d’Or, un peu envahi ce radieux dimanche, je laisse s’irriguer le cortex surchauffé.
A droite, à l’ombre d’un touffu, un jeu duo d’amoureux explore les émois de baisers infinis ; en face une jeune femme allongée sur le tapis vert, toujours à l’ombre, studieuse dans un bouquin, stylo en main, avant de tenter l’endormissement.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire